Louis de Boissy

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Auteur dramatique, né à Vic-sur-Cère le 26 novembre 1694, mort à Paris le 19 avril 1758.

Auteur prolifique de comédies et vaudevilles, élu à l’Académie française en 1754, directeur du Mercure de France jusqu’à sa mort.

Scènes extraites de la pièce de théâtre "Les dehors trompeurs"

Personnages

Le Marquis.
La Comtesse.
Céliante, sœur du baron.
Lisette, suivante de Céliante.

Acte I - Scène III

La Comtesse, Céliante, le Marquis.
La Comtesse, à Céliante

[…] Mais vous fuyez le monde, et l’on ne vous voit pas.

Dans votre appartement, quoi, toujours retirée !

Jeune et formée en tout pour être désirée,

Quel injuste penchant vous porte à vous cacher ?

Il faut donc, pour vous voir, qu’on vienne vous chercher.

Je prétends vous tirer de cette nuit profonde,

Vous inspirer l’amour et l’esprit du grand monde.

Se tenir constamment recluse comme vous,

C’est exister sans vivre, et n’être point pour nous.

Céliante
Vos soins m’honorent trop.
La Comtesse
Trêve de modestie.
Céliante
Vos bontés…
La Comtesse
Laissons là mes bontés, je vous prie.
Céliante
L’obscurité convient aux filles comme moi.
La Comtesse
De conduire vos pas je veux prendre l’emploi.
Céliante
Pour suivre votre essor et l’esprit qui vous guide,
Ma raison est trop foible, et mon cœur trop timide.
Les préjugés communs me tiennent sous leurs lois ;
Et je soutiendrais mal l’honneur de votre choix.
La Comtesse

Vous êtes demoiselle, et faite pour paroître,
Et vous ne brûlez pas de vous faire connoître ?
Vous flatter, vous nourrir de cet unique soin,
Pour vous est un devoir ; je dis plus, un besoin ;
Et celui de dormir et de se mettre à table,
N’est pas plus fort chez nous que celui d’être aimable.
La nature à mon sexe en a fait une loi.
Se répandre et briller, c’est respirer pour moi.

Céliante

Je mets, pour moi, qui n’ai nulle coquetterie,
À fuir surtout l’éclat, le bonheur de la vie ;
Et je tâche à trouver ce souverain bonheur,
Non dans l’esprit d’autrui, mais au fond de mon cœur.

Le Marquis, à la Comtesse

Au sein de la raison sa réponse est puisée.

J’en suis édifié.

La Comtesse, au Marquis
Moi, très scandalisée.
(à Céliante)
Mais il faut donc par goût que vous aimiez l’ennui ?
Céliante
Il ne m’est inspiré jamais que par autrui.
La Comtesse, à part
Qu’elle est sotte à mes yeux !
Céliante, à part
Qu’elle est extravagante !

Acte I - Scène V

La Comtesse, le Marquis
La Comtesse

Se peut-il du baron que ce soit là la sœur ?
Comment la trouvez-vous ? Parlez.

Le Marquis

Très estimable.
La Comtesse

Son esprit est brillant !

Le Marquis

Mais il est raisonnable.
Et le bon sens, madame…
La Comtesse
Est chez vous déplacé.
Il sied bien à vingt ans, monsieur, d’être sensé !

Le Marquis

On peut l’être à tout âge.
La Comtesse
Ah ! quel travers extrême !
Je ne puis m’empêcher d’en rougir pour vous-même.

Le Marquis

Je fais cas du bon sens ; et bien loin d’en rougir,
J’ai le front de le dire et de m’en applaudir.

La Comtesse

Vous prisez le bon sens ! Ô ciel ! Puis-je le croire ?
Un jeune homme de cour peut-il en faire gloire ?
C’est un être nouveau qui n’avait point paru.

Le texte complet de cette savoureuse pièce de théâtre, représentée pour la première fois le 18 février 1740, est librement accessible sur Wikisource :

On trouve également, sur Wikisource, un éloge de Louis de Boissy par le célèbre D’Alembert, co-directeur avec Diderot de la fameuse encyclopédie 

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